LE GRAND MAGAL DE TOUBA

Que la paix et la bénédiction d’ALLAH soient sur vous.
Gloire à notre Seigneur, Lui qui nous gratifie de Ses bienfaits à tout moment et à tout instant. Nous Lui prions de les accroître, car les Bienfaits et les Grâces de notre Seigneur sont inépuisables. Le Prophète Mouhammad, sur lequel prient notre Seigneur et Ses Anges, priait notre Seigneur pour qu’Il lui multiplie ses connaissances. En effet il est dit dans le Saint Coran : « ALLAH augmente mes connaissances ». Dans un hadith il dit « Je préfère la mort que de rester un seul jour sans augmenter mes connaissances sur notre Seigneur ».
Plus on connaît DIEU, plus on L’aime et l’amour envers DIEU est le véritable amour.
Que la Bénédiction d’ALLAH soit sur le Prophète Mouhammad, sur sa famille et sur ses compagnons.
Que la Grâce et la Lumière d’ALLAH et Sa Bénédiction soient répandues sur l’âme de Cheikh Ahmadou Bamba (le serviteur privilégié du Prophète), sur ses compagnons et sur tous ceux qui l’ont précédé dans le sentier d’ALLAH.
Nous saluons tous les musulmans, tous les disciples.
Ce présent sermon s’articule autour du Magal de Touba.
C’est Cheikh Ahmadou Bamba qui a donné à cet événement le nom de « Magal » afin de rectifier certains disciples qui commençaient à parler d’une deuxième Tabaski (Aïd El Kabîr ou la fête du mouton), tradition en souvenir du Prophète Ibrahim et de son fils Ismaïl (P.S.E).
En effet, tout homme de Dieu a vécu un jour qui a marqué son histoire, pour y avoir reçu les Bienfaits inépuisables d’ALLAH. C’est ce qui a fait dire au Prophète que parmi les jours et les mois, il y en a certains que notre Seigneur a choisi pour y faire descendre Ses Grâces, Sa Miséricorde et Ses Bienfaits. Le savant, c’est celui qui profite de ces moments. C’est comme la nuit du Maouloud (Gamou) durant laquelle notre Seigneur accorde Ses Grâces à des milliards de personnes, la nuit de la Destinée (Laylatoul Qadr) qui a vu la descente du Coran comme Guidée et Lumière pour tous les Hommes… Il est cependant rare que ces jours marquent l’anniversaire de la disparition d’un homme de Dieu. Mais, le Prophète disait de son jour de disparition : « Mon Seigneur je Te prie de faire du jour de notre rencontre (ma mort) mon meilleur jour ». Car c’est un jour de plaisirs et de joie éternels pour lui.
Cheikhoul Khadim a, toute sa vie durant, lutté pour la cause d’ALLAH. Il a rappelé la voie droite et a restauré le Mouridisme (confrérie).
En effet, le Mouridisme est né avec l’humanité (depuis Adam). En ce temps là, il y avait deux sortes de mourides (aspirants) qui existeront tant que dureront la terre et les Hommes. Il s’agit de celui qui aspire à ALLAH et celui qui ne fait que suivre ses propres passions.
Lorsque l’un des fils d’Adam a tué son frère à cause de l’amour de la vie, ALLAH a désigné Adam comme Prophète et Messager chargé de la mission d’indiquer aux hommes la voie juste et les aider à se détourner de la vie et à tendre vers Dieu. Car, la vie présente est très éphémère tandis que la vie future est éternelle.
Tous les Prophètes (P.S.E) ont répété le même message. Ils dirent à leur peuple : « Tout homme qui suit les recommandations de notre Seigneur recevra Ses Grâces et Ses Bénédictions. Par contre, celui qui s’en détourne sera châtié durement.  Voila le chemin qui mène au Paradis, suivez le ; voila le chemin qui mène en Enfer, détournez vous-en! » Les doués de raison suivent leurs conseils et les égarés s’en détournent, préférant suivre leurs propres passions aidés en cela par Satan le lapidé. Après la mort d’Adam, son fils Sihsa sera, lui aussi, désigné comme Prophète. Il recevra le Livre et aura pour mission de rappeler les enseignements d’ALLAH. C’est ainsi que le cycle de la prophétie va se poursuivre durant toute l’histoire de l’humanité pour se clôturer avec Mouhammad (P.S.L).
Mais à la mort de chaque Prophète, les hommes retournent à leurs passions et oublient les enseignements du Prophète. Ils oublient vite la mort et se tournent vers la vie. Le Prophète (P.S.L) disait à ce propos : « L’amour de la vie est la porte de tous les vices ». Les Prophètes (P.S.E) dirent aussi : « La vie présente n’est que jouissance temporaire. Vous retournerez tous à votre Seigneur. » Mais, Satan vous embellit cette vie qui est très éphémère. Quelque soit l’importance et la portée du message, à chaque fois l’envoyé d’ALLAH leur tourne le dos, les hommes retournent à leurs anciennes pratiques d’idolâtrie. Et pourtant leurs enseignements sont toujours contenus dans les Livres, mais les gens ne s’en rappellent même pas.
En clôturant le cycle de la prophétie, Mouhammad (P.S.L) a annoncé qu’au début de chaque siècle, notre Seigneur confiera l’Islam à quelqu’un, dans un contexte de dégradation de la foi et de manque d’intérêt que les populations accordent à leur religion. Si nous prenons l’exemple de notre pays, le Sénégal, beaucoup de musulmans préfèrent envoyer leurs enfants à l’école française au détriment de l’apprentissage du Saint Coran. Les deux peuvent même aller ensemble, mais l’apprentissage du Saint Coran doit être la priorité pour tout musulman. Le savoir religieux doit précéder tout autre savoir.

Une suite ininterrompue d’hommes de Dieu va se succéder sur terre depuis la disparition du Prophète (P.S.L). Il peut arriver qu’ils apparaissent en même temps, chacun dans un endroit. Il peut arriver qu’un petit nombre seulement de fidèles les suivent, ceux qui bénéficieront de la Grâce et de le Miséricorde de notre Seigneur (que Sa Grandeur soit exaltée).
C’est dans ce contexte qu’apparut Cheikh Ahmadou Bamba, le serviteur du Prophète. Il reçut les Grâces et les bénédictions de notre Seigneur au vu et au su de tout le monde. Il occupe une place privilégiée parmi les hommes de Dieu qui ont indiqué la voie droite, l’unique qui permet d’accéder à ALLAH.
C’est ainsi qu’il commença à restaurer la voie mouride à Mbacké Kajoor où habitait son père Mame Mor Anta Salli. Ce dernier était le qadi (conseiller juridique) de Lat Joor, enseignant le Coran à coté du roi. A chaque fois que ce dernier avait besoin de lui pour les affaires juridiques, il le faisait appeler. A sa mort, il fut enterré à Dékheulé à coté de Lat Joor.
Dés sa tendre enfance, Cheikh Ahmadou Bamba commença à montrer les signes d’un futur homme de Dieu. A l’age de trente ans, à la mort de son père, il appela tous les fidèles de Mbacké Kajoor à se joindre à sa mission. Certains le suivirent, mais d’autres s’en détournèrent. Après quelques mois, il quitta Mbacké Kajoor pour se rendre à Mbacké Baol, la terre de ses ancêtres, fondé par son grand père Mame Marame Mbacké (père de Mame Mor Anta Salli) originaire du Djolof.
Mame Marame avait un ami du nom de Serigne Malamine Sarr qui habitait dans le Baol. Aux funérailles de ce dernier, tué par le roi (du nom de Cissé), il s’y rendit en compagnie de toute sa cour pour présenter ses condoléances à la famille éplorée. Le roi, ému par la grandeur de cet homme, saisit vite la gravité de sa faute, car il ne pouvait imaginer que la victime pouvait connaître un homme de la dimension de Mame Marame. Afin de réparer son crime, il proposa à Mame Marame un terrain dans son village, ce que ce dernier accepta, d’où aujourd’hui le village de Mbacké Baol. Mais Mame Marame ne s’y s’installa pas. Il le confia à son fils aîné Ibrahima Awa Niang. Ses frères le rejoindront plus tard et progressivement, le village ne fut peuplé que de Mbacké-Mbacké (c’est à dire des gens du nom de Mbacké).
A Mbacké Baol, Serigne Touba poursuivra sa mission de restauration des authentiques valeurs islamiques léguées par le Prophète Mouhammad (P.S.L) qui commençaient à se perdre au sein da la société à cause de la colonisation.
A l’image de tous les Hommes de Dieu, sa noble ambition rencontra vite des résistances venant de partout : d’abord de sa propre famille (certains de ses demi-frères), ensuite de l’élite locale, mais surtout de l’administration coloniale. Les disciples qui l’ont suivi ont été persécutés, pourchassés, torturés et même souvent tués.
Après avoir passé quelques temps à Mbacké Baol, il effectua un court séjour chez les Boussobé (la famille de sa mère) avant de fonder le village de Darou Salam. Ensuite, il fonda Touba où il passera sept ans.
Un jour, alors qu’il effectuait sa retraite spirituelle dans la mosquée de Darou Khoudoss, comme il avait l’habitude de le faire, le Prophète (P.S.L) lui apparut pour lui annoncer les dures épreuves qu’il devrait subir avant d’obtenir ce qu’il cherchait de Dieu. Mais il lui fit savoir que tant qu’il restait à Touba, il ne pourrait les subir, car ce village est sous la protection de notre Seigneur. Alors, il se rendit à Mbacké Baari. Ce village appartenait à l’époque au roi Samba Laobé. Cheikh Ahmadou Bamba s’y installa aux cotés de Ma Abdou Lô et de Ibra Fatim Sarr. L’installation de Serigne Touba à Mbacké Baari va très vite susciter la jalousie et la haine du roi. En effet, Samba Laobé devint de plus en plus impuissant avec la ruée de sa cour vers le Cheikh. Il complota alors contre lui en imitant sa signature dans une lettre qu’il adressa au gouverneur de Saint Louis, le menaçant d’une éventuelle attaque de lui et du marabout. A l’époque Mbacké Baari était un point stratégique, ce qui inquiétèrent les colons.
Face à ces manigances qui s’amplifiaient de jour en jour, et l’installation de Serigne Touba à Mbacké Baari devenant de plus en plus insupportable, l’administration coloniale de Saint Louis le convoqua, pour répondre devant le tribunal à toutes ces accusations portées sur sa personne. En réalité ces accusations n’étaient que des prétextes montés de toutes pièces pour l’arrêter et l’éloigner de ses disciples qui devenaient de plus en plus nombreux. C’est ainsi que l’audience décida de son exil en Afrique équatoriale, au Gabon. C’est donc ce jour du 18 safar qui marque la célébration de l’anniversaire du grand Magal de Touba, symbolisant la victoire de Cheikh Ahmadou Bamba sur ses ennemis.
A son retour, après plus de sept années d’exil, il chercha un mouton à l’occasion du premier anniversaire et l’immola, en guise de reconnaissance à son Seigneur ; ce fut à Ndiareem (Diourbel). Ainsi ce jour de 18 safar devint son propre jour. Il demanda à tous les disciples, où qu’ils puissent se trouver, de le célébrer en immolant du coq au chameau chacun selon ses moyens, afin de rendre grâce à notre Seigneur pour tous les bienfaits qu’IL lui a accordés en ce jour mémorable. Important, ce jour du 18 Safar l’est, d’autant plus que Serigne Touba en dit lui-même que, celui qui le célèbre aura toujours un rang plus élevé sur celui qui ne le fait pas. Aussi, l’anniversaire du 18 safar est ressenti jusqu’au paradis.

Après sa disparition en 1927, son fils aîné Serigne Mouhammadou Moustapha Mbacké perpétua la tradition. C’est durant le califat de Serigne Fallou Mbacké que ce dernier appela pour la première fois à un rassemblement à Touba pour célébrer le Magal.
Le Magal de Touba est un jour de pardon, de grâces, de bienfaits et de miséricorde. C’est en même temps une importante occasion pour rappeler à tous les disciples les enseignements de Serigne Touba. Cependant, il est à constater que dans la plupart des familles maraboutiques, le Magal se réduit simplement au festin et à ce que les disciples leur remettent comme argent (adiya). Serigne Touba a recommandé dans ce jour la lecture attentive du Saint Coran, des prières sur le Prophète (khassaides) et des repas. Aussi, l’exemple de Serigne Touba doit servir de leçon à tous ceux qui viennent à Touba pour célébrer ce jour de 18 Safar. En dépit des multiples contraintes, difficultés, privations…, il ne s’est jamais écarté des recommandations d’ALLAH et s’est toujours démarquer de Ses interdits. Le rappel doit être l’unique préoccupation du guide. Il ne doit en retour s’attendre à quoi que ce soit venant de la part de ses disciples. Sa mission est d’indiquer la voie droite et d’appeler tous les hommes à la suivre. Notons à ce propos que le présent (adiyya) est une obligation pour tout disciple qui rencontre un vrai homme de Dieu, héritier du Prophète (P.S.L) sur tous les plans. On ne doit jamais saluer pareil homme les mains vides. Pour preuve, dans la sourate Moujjadallah, ALLAH dit : « Vous les croyants, avant de vous entretenir sur un quelconque sujet avec le Prophète, donnez lui d’abord de votre bien ». Ceci à juste raison, car le Prophète n’a pas le temps d’aller au marché pour faire du commerce, ni d’aller cultiver dans les champs, du fait de ses multiples sollicitations de la part des musulmans sur des questions religieuses.
Le Magal constitue donc un moment opportun pour les guides religieux pour rappeler à tous les fidèles, sans chercher à plaire à qui que ce soit, les recommandations et les interdits de notre Seigneur. Ceux qui suivront les recommandations de notre Seigneur rencontreront Sa Félicité. Par contre ceux qui s’en détournent rencontreront Sa punition (qu’ALLAH nous en préserve).
Cheikh Ahmadou Bamba avait l’habitude de rappeler aux guides : « les disciples ne sont ni vos propriétés, ni vos esclaves, ni vos propres enfants. Ce sont vos frères et sœurs dans la religion. Que ce qu’ils vous donnent ne vous distrait guère. Ne les égayer non plus en raison de ce qu’ils vous donnent. Rappelez-leur les recommandations de notre Seigneur et Ses interdits. »
Les enseignements de Serigne Touba doivent être revivifiés, à l’occasion du Magal, en insistant sur ce qu’est le Mouridisme.